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Les objets du trésor de Mâcon - par daniel le 06/01/2015 @ 16:30

Le trésor antique enfoui à Mâcon

et les objets conservés

(avec la collaboration de F. Peulson et N. Trouilloud)

 

Rappel  introductif

Nous sommes le  1 mars 1764, lors des travaux de remblaiement d’une cour intérieure de l’Hôtel Dieu alors  en construction, un vigneron et ses ouvriers qui prélèvent de la terre à l’emplacement d’un ancien chemin,, découvrent par hasard, à huit ou neuf pieds sous terre (soit près de 3 m), un amas métallique constitué de bijoux, de quelques 40 000 monnaies et de pièces d’argenterie de l’époque gallo-romaine.

Parmi elles, se trouvaient des pièces cultuelles d’une rare importante.

Mais pourquoi sont-elles là ?  Pourquoi sont elles enfouies au milieu de tuiles, briques et autres vestiges de constructions ?

Quelles sont les raisons qui ont poussé les propriétaires à ne jamais les récupérer ?

Les monnaies les plus récentes observées à l’époque, sont des monnaies à l’effigie de l’empereur Gallien, ceci permet de placer la date d’enfouissement du trésor vers 260 de notre ère. Quelle était la situation de la Gaule à cette période ?

L’effondrement d’un empire

Au  milieu du IIIe  siècle, des vagues d’envahisseurs germaniques déferlent dans une Gaule dont les armées ne sont plus en mesure d’endiguer ce flot.
Le monde romain exerçait alors un attrait de plus en plus fort sur les tribus qui se massaient sur la frontière,  le limes.

Les Barbares,  à l’est du Rhin, dont notamment les Frisons, les Francs, les Saxons et les Alamans, d’origine germanique, décidèrent  à ce moment là, de profiter de la faiblesse de l’autorité impériale minée par les guerres internes successives, guerres civiles liées à la lutte pour la conquête du pouvoir entre les généraux romains, pour se lancer dans des razzias à travers la Gaule. Ce phénomène de dissimulation des biens précieux et autres économies est bien caractéristique de ces périodes de crise. La découverte d’autres trésors datables de la même période dans nos régions, est la preuve de l’irruption des bandes barbares dans le Mâconnais. Ces pillages furent certainement dévastateurs puisque les propriétaires ne sont pas revenus les chercher.

A qui pouvait appartenir un si considérable trésor ?

Hélas la question demeure en suspend et nous en somme réduits aux hypothèses. Il pourrait s’agir du trésor d’un temple ce qui fut la première hypothèse. Mais d’autres possibilités sont envisageables somme les biens d’une riche famille, ou encore le trésor d’une corporation. Pour cette dernière hypothèse, nous savons que commerçants et artisans se regroupaient en corporations. Celles-ci avaient pignon sur rue. Dans le bâtiment qu’occupait une corporation on trouvait un espace consacré au culte de leur divinité tutélaire ; Les forgerons et les nautes (qui assuraient le commerce fluvial) formaient de puissantes et prospères corporations.

Descriptions des objets conservés du trésor de Matisco.

Du trésor, ne nous sont parvenus que huit statuettes : un Jupiter, quatre Mercure, une Luna, une divinité Panthée et un génie ; ainsi qu’un plat à fonction rituelle. Tous ces objets sont en argent

 

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Jupiter, haut de 6,5  cm est représenté debout ; la main gauche tenant le sceptre aujourd’hui perdu. Le corps est puissamment modelé ; le visage est expressif et il est entouré d’une coiffure exubérante. Jupiter, dont l’équivalent chez les grecs  est Zeus, est le Dieu de tous les dieux et il est le roi du ciel et de la terre. Jupiter étant particulièrement invoqué pour obtenir  des faveurs militaires ou pour solidifier l’autorité des  Paters Familias (les pères de famille). Il est le plus grand Dieu du panthéon romain. Il est généralement représenté avec la foudre et le sceptre, symbole de puissance et de la foudre divine, qu’il peut exercer sur les mortels.

 

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L’ensemble comprend quatre statues de Mercure.  Le dieu Mercure symbolisant  le dieu protecteur du commerce, des marchands et… des voleurs (!), mais aussi de la fortune, du voyage et qui est assimilé à Hermès chez les grecs, le messager des dieux, d’où sa représentation avec des ailes aux talons et coiffé d’un béret ailé (le pétase). Dans le groupe des quatre Mercure, deux sont de valeur exceptionnelle et les deux autres sont plus conventionnels. Ainsi il est clair que ce dieu du commerce, de la bonne fortune, était muni de sa bourse bien rempli ainsi que du caducée. Mercure est une divinité très apprécié dans le pays éduen, territoire dont Matisco faisait partie, et dont Autun (Augustodunum) était le chef lieu de cité

 

 

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Le Genius étant un dieu mineur, un lare familiaris. Ce dernier qualificatif évoque un commensal bienveillant. Evocateur d’un ancêtre commun à toute la famille. Il est le gardien du foyer et de toute la famille. Le jeune homme  à la couronne tourelée, porte des bottines et il est  vêtu d’un manteau couvrant le bras gauche.

 

Si les représentations masculines réunies dans le trésor ne sortent pas de la gamme habituelle des divinités retrouvées en Gaule, la situation se présente de façon différente pour ce qui concerne les déesses.

 

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La déesse de la lune  appelée, chez les grecs, Séléné. Diane (Artémis chez les grecs) en réunit aussi les archétypes : « chasse, femme et lune ». La figurine de  Luna, haute de  7,7  cm, étant placée sur un socle avec des incrustations dorées. Elle a  un long chiton (manteau) orné de deux bandes verticales dorées. Elle est comme les autres statuettes, en argent.

 

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La tutela panthée (cf. objet du mois en décembre) est le chef d’œuvre de la collection et hormis sa complexité, on admire aussi  la beauté rare de son  style. Rappelons que la divinité est ceinte d’une couronne en forme de muraille ce qui tend à la placer comme protectrice de la ville. Elle est investie du pouvoir des dieux dont elle porte les bustes sur un croissant de lune : Saturne, Sol, Luna, Mars, Mercure, Jupiter et Vénus (Dieux du panthéon, planètes et jours de la semaine). Les Dioscures, Castor et Pollux, soutiennent les ailes qui portent le croissant de lune. La déesse tient dans sa main droite une patère (récipient destiné aux offrandes). De son bras gauche, elle soutient des effigies de Diane et Apollon, tenant chacun une corne d’abondance. La multiplicité des représentations exprime toute la charge symbolique de cette représentation. Autant d’éléments qui lui confèrent une puissance protectrice et qui donnent des gages de prospérité.

  

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Le dernier objet qui nous est parvenu est un plat en argent : une patère. Celle-ci étant quant à elle, une pièce de vaisselle ronde (genre de poêle), servant d’apport rituel lors de  festivités votives (pour  remercier les dieux de leurs générosités lors, par exemple, de victoires) ou lors d’un banquet, pour s’assurer la bienveillance des augures, lors d‘une quelconque entreprise ou création d’un commerce. Trop fragile, cette patère n’a pas été reproduite pour le musée des Ursulines de Mâcon.

Des copies des statuettes sont présentées au musée des Ursulines de Mâcon, quant aux originaux, ils se trouvent au british museum de Londres.

 

Bibliographie

Barthèlemy 2007b : BARTHELEMY (D.). - Fouilles de la Maison médicale du Clos de la Moussière, cours Moreau à Mâcon, 1991, in Baratte F. dir, Béal J.C. dir., Joly M. dir., Autour du trésor de Mâcon, luxe et quotidien en Gaule romaine, actes du colloque de janvier 2005, Institut de Recherches du Val de Saône Mâconnais, Mâcon, 2007, 246 p.

Painter 1989 : PAINTER (K.). – Le trésor de Mâcon dans Trésors d’orfèvrerie gallo-romains, sous la direction de François Barate, catalogue d’exposition,1989, pp. 184-196.

 

 

 


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